Témoignage de visites à la prison de Valenciennes
Article extrait du Bulletin de la Fraternité Anizan, n°76, juin 2024, page 8
Depuis mai 2023, je participe aux messes dominicales qui ont lieu un samedi après-midi par mois à la prison de Valenciennes.
Touchée par l’univers carcéral
Je suis interpellée par le monde carcéral depuis le suicide, dans cet endroit, d’un de mes anciens élèves, Terry. Je l’avais eu à 10 ans dans ma classe de CM1. Il vivait dans un milieu défavorisé avec une maman en difficulté financière et morale, très dure avec son enfant. Lui-même était un enfant difficile qui avait été renvoyé de plusieurs écoles publiques. Un attachement réciproque s’était créé avec le temps entre lui et moi. Arrivé dans la partie collège de notre établissement privé catholique, il fut renvoyé au 2ème trimestre de la 6ème. Il poursuivit un parcours chaotique qui le mena en prison à 18 ans où il se suicida quelques semaines avant sa sortie. Depuis ce temps, je le porte dans ma prière à chaque messe quand on prie pour nos défunts.
Messes à la maison d’arrêt
Depuis 12 ans, j’accompagne des familles en deuil dans ma paroisse. Il y a plusieurs années, j’ai préparé les funérailles d’une dame assassinée par son époux. Les enfants le rejetaient totalement. Je ne le connaissais pas, mais je le portais dans ma prière. Début 2023, je discutais, dans ma paroisse, avec l’équipe de l’aumônerie de la prison et ils me parlèrent de ce détenu, Bernard, qui était en train de faire avec eux un très beau parcours de conversion. A Pâques 2023, il s’est confessé et a écrit un très beau témoignage sur son repentir. Les membres de l’équipe me demandèrent si je voulais le rencontrer en assistant aux messes de la maison d’arrêt avec eux. J’acceptai volontiers, mais il se suicida une semaine avant cette célébration.
Je décidai d’accompagner quand même l’équipe en sa mémoire et celle de Terry. Cette première fois fut très impressionnante mais ce fut une belle expérience humaine. J’ai rencontré une douzaine de détenus au cours des deux messes puisqu’il y a deux quartiers séparés. Depuis ce jour, presque chaque mois en fonction de mes disponibilités, j’assiste à ces messes très priantes, recueillies ; les détenus motivés chantent et participent au partage de l’Evangile.
Un lien très fort se crée entre les détenus et ceux qui viennent à leur rencontre à la prison
Au cours de cette année, plusieurs prisonniers ont fait leur Première Communion et reçu ensuite le Sacrement de confirmation par notre évêque. Une des membres de notre équipe de la Fraternité Anizan de Valenciennes, Claudine Lamé, fait partie de cette aumônerie. Elle accompagne, avec d’autres personnes de notre paroisse, un groupe de détenus chaque samedi après-midi en les aidant dans leur parcours de rencontre avec le Seigneur et en les faisant progresser dans leur Foi. L’un de ces prisonniers, maintenant libéré, a reçu les Sacrements au cours de cette année et a écrit dans sa lettre de motivation adressée à notre évêque: “Je pense que Dieu m’a envoyé ici pour que je Le rencontre”.
Un lien très fort se crée entre les détenus et ceux qui viennent à leur rencontre. Au retour de la première fois à la prison, j’ai remercié le Seigneur de m’avoir donné cette possibilité de dépasser mes peurs, de m’avoir permis de vivre ces moments très forts de fraternité et d’échange avec les prisonniers. Depuis, après chaque rencontre, je les porte dans ma prière.
Marie-Odile Leroy, Fraternité Anizan à Valenciennes
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