Révélé aux tout-petits par Frédéric-Marie Le Méhauté
Pourquoi veut-on vivre ?
Le père Frédéric-Marie Le Méhauté, Franciscain se demande : Comment les humains se débrouillent-ils pour continuer à exister chaque jour ? Pourquoi veulent-ils vivre ? Qu’est-ce qui fait que les enfants ont envie de devenir grands ? Pour vivre il faut croire un peu en l’humanité. Mais quand on a approché de trop près la barbarie humaine, on peut être tenté de tout arrêter.
Qui se souvient des pauvres eux-mêmes ?
Comment dire la vie en abondance, promise par le Dieu qui ressuscite Jésus, sans gommer la souffrance, sans « silencier » une fois encore tous les vaincus ? Se pourrait-il vraiment que les pauvres, ceux qui traversent la vie en se confrontant à la radicale fragilité, à l’absence des relations, à l’exclusion, nous ouvrent un chemin et rendent présente la Bonne Nouvelle ? Se pourrait-il qu’ils nous dévoilent l’identité profonde de Jésus, non seulement après qu’ils aient surmonté les épreuves, mais également au cœur même de ces échecs ? Nous nous souvenons des paroles des saints qui ont œuvré auprès des pauvres, mais qui se souvient des pauvres eux-mêmes ? Leur expérience est souvent oubliée et leur pensée méconnue. « La sagesse du pauvre est méconnue et ses paroles, personne ne les écoute » lit-on dans la Bible.
Le pauvre rend actuelle la présence de Jésus en nous
L’être humain éprouve dans ses limites, sa fragilité, son péché, la violence qui écrase : « Ce n’est pas une vie, on n’est pas des chiens », mots pour dénoncer injustice et déconsidération, pour donner à voir une autre image de soi. Frédéric-Marie Le Méhauté pense que “rendre actuelle la présence de Jésus en nous, tel est le mystère propre du pauvre”.
La foi au Christ naît toujours de témoins
La révélation de ce qui a été caché est donnée à des tout-petits. Il y a là une partialité qu’il faut assumer. Certes le salut est pour tous, mais il nous advient d’abord par certains. Une promesse inconditionnelle court toujours le risque de tomber dans le conservatisme politique ou le pharisaïsme religieux. Écouter les pauvres ne doit pas seulement conduire à la dénonciation des injustices sociales économiques ou ecclésiales, mais aussi proposer une autre modalité du vivre-ensemble. Nous ne devrions jamais disjoindre le Christ des pauvres mais plutôt entendre le Christ à travers les pauvres et les pauvres dans le Christ. La foi au Christ naît toujours de témoins.
Frédéric-Marie Le Méhauté parle du cumul des précarités
Dans leur fragilité ces témoignages permettent à l’homme de se mesurer à ce qui est incommensurable. Tout être humain est précaire et vulnérable, mais ce qui qualifie le pauvre, c’est le cumul des précarités. Comment imaginer une telle cascade, un tel enchaînement ? Plutôt que d’entrer dans les catégories figées qui enferment dans des stéréotypes, mieux vaut entrer dans une dynamique : le pauvre est l’inaudible, l’invisible, il est l’absent, « l’imprésent » qui introduit un manque, une inquiétude, mais qui met en mouvement. Oui la parole des pauvres désarçonne, car elle est recherche de l’absent.
Vouloir entendre une sagesse que le monde ne veut pas entendre
Accepter qu’il y ait une lumière dans le monde des pauvres et une lumière originale est une option. Prendre cette option, c’est accepter de se lancer dans une aventure et donc se risquer sur des chemins dont on ne sait pas où ils nous mèneront. Cette aventure est motivée par une espérance et une attente : vouloir entendre une parole qui manque au monde et à l’Eglise, une sagesse que le monde ne veut pas entendre.
Si notre foi et notre espérance s’épuisent, c’est parce que nous ne savons plus, nous ne voulons pas entendre les plus pauvres. « Ressusciter, c’est revenir à la vie ». Et dans cette résurrection il y a le pardon, nécessité pour vivre et manière de croire. C’est pour moi le sens de l’aventure humaine.
Eric Récopé fc
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