La charité est attirante, les coulisses du groupe théâtre

13 Nov 2023 | Chantiers, Projet T' | 0 commentaires

Auteur de l'article : Laura de l'équipe animatrice
Crédit photos : Aurélien Jaune

La charité est attirante, les coulisses du groupe théâtre

C’est la réplique de sœur Madeleine, jouée par Sabrina dans la pièce de théâtre “Charité Point Comme”. Oui, la charité est attirante, si attirante qu’elle a motivé un groupe de jeunes de Saint-Ouen (95) à répondre à l’appel du père Benjamin Vergniaud fc pour monter une troupe de théâtre. Voilà plus de deux ans que la troupe est créée et nous avons commencé à nous produire il y a quelques mois. Voici les coulisses de cette aventure de groupe…

Un appel mis à l’épreuve

Ce n’est pas simple de s’engager dans une aventure inconnue, sur un temps long quand on est jeune (l’est-il pour les moins jeunes d’ailleurs) ? Les week-ends de répétition étaient bien fixés à l’avance, mais les exigences du quotidien, les études, le sport sont venus mettre à l’épreuve la disponibilité des jeunes. Ils se sont bien vite rendus compte que si l’un d’eux n’était pas là, c’est tout le groupe qui était pénalisé. En effet, comment répéter avec un rôle manquant ? Mais, plutôt que de s’en tenir rigueur les uns aux autres, ils ont fait l’expérience de cette vie communautaire qu’est la vie en Eglise.

Nous jouons tous un rôle important dans le corps de l’Eglise, et lorsque l’un de nous vient à manquer ou à faiblir, c’est l’ensemble du corps qui est déséquilibré. C. en a fait l’expérience, elle me confiait : « La vie de groupe est difficile pour moi, mais je sens l’appel à faire partie de ce corps et ça m’aide à sortir de ma bulle ». Pour G., « Ça m’a appris à mieux gérer mon temps ». Alors, pour nous accompagnateurs, il faut veiller à ce que chacun trouve sa place et contribue à l’équilibre du groupe.

La fraternité pour réponse

Les aider à maintenir cet équilibre est un vrai défi. Au-delà de la volonté de former un groupe, une troupe solidaire et fraternelle, nous avions le désir de leur faire vivre quelque chose de cette fraternité chère au père Anizan à chaque moment passé ensemble : du petit déjeuner aux temps de réflexion sur le sens de ce projet en passant par de petits défis.

Lors du dernier week-end de répétition, nous leur avons secrètement confié une personne de la troupe dont ils devaient prendre soin. L’objectif était de faire résonner en eux la phrase de Marie, dans la pièce, lorsque son regard croise celui du père Anizan : « C’était un regard plein de bonté… comme s’il voulait prendre soin de moi ». Leurs retours sont édifiants : C’était « mettre un peu de soi de côté » a dit M. Ou encore, c’était « faire l’expérience de donner la main à l’autre, et ainsi de créer une chaîne, et c’est ça le travail de la charité » confiait O. C’était « vivre vraiment le partage en apprenant les uns des autres parce que, pour prendre soin des autres, il faut être attentif à eux, mais c’est dur », a dit N. Et enfin, S. nous a rappelé que « la charité nous unit entre nous, et à Dieu sans être intrusive avec les autres mais en étant présente ». Finalement le théâtre c’est aussi une expérience de charité : travailler à veiller sur l’autre en le laissant prendre sa place. Et « quelle responsabilité ! », s’étonne J.

Une joie de se retrouver

Malgré l’exigence que demande cet engagement, la joie de se retrouver a toujours été plus grande que le reste. Ces temps sont finalement « hors du temps », disent les jeunes, comme une pause, une respiration dans leurs vies. La vie en communauté fait grandir.

Un dépassement de soi

Pour les jeunes acteurs, s’approprier son personnage, retenir son texte, jouer dans l’espace changeant n’est pas facile. Ils nous confient leurs peurs, mais surtout la fierté de progresser. « Je ne pensais pas en être capable », disent-ils.
Les jeunes n’ont pas fait de théâtre et ne sont pas acteurs. Ils jouent avec leur coeur, leurs peurs, leurs tripes ! Ils se redécouvrent, s’acceptent, se critiquent pour construire ensemble quelque chose. Porter un regard nouveau sur l’autre à travers l’expression artistique. C’est une véritable expérience d’humanité, de vie d’Eglise. Je me demande souvent si j’ai aussi ce regard qui questionne l’autre avec bienveillance. Ils osent… est ce que nous osons aussi ?

Un questionnement sur la vie

Les jeunes osent aussi questionner leur vie à partir de celle des personnages de la pièce. Les sujets comme la guerre, la mort, la précarité sociale, ils les connaissent bien, mais ce n’est pas ce qu’ils retiennent de la pièce. La vie des personnages, touchante et cruelle parfois, semble davantage les faire vivre. « Je ne suis pas encore syndiqué, et dans la vie je ne suis pas comme Marcel, » dit E, « mais je le comprends ». Et à le voir taper du poing sur la table, on comprend bien que le combat des ouvriers du siècle dernier ne lui est pas indifférent.

Une Espérance vivante

Accepter d’apprendre, de se mettre en difficulté et puis se rendre compte que finalement on est capable : la fin de la première représentation a sonné comme un « on l’a fait ! » Pourtant tout n’était pas parfait. Mais ils l’ont fait, et ils sont prêts à le refaire, à s’améliorer encore, à espérer encore, à grandir ensemble encore ! La charité est motivante…

Laura, de l’équipe animatrice

Article extrait de “L’Espérance est vivante” (chantiers n°220, décembre 2023)

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Hommage au père Jean Naert fc (29/01/1928 – 19/12/2025)

Jean Naert fc est décédé le 19 décembre 2025 après une vie pastorale au Québec, Villeneuve-Saint-Georges, Sallaumines, Saint-Ouen, Valenciennes, Issy-les-Moulineaux, Auxerre, Gentilly, Colombes.

Invitation à la pièce “Au nom de la mère” le 24 mars 2026

Invitation à la pièce "Au nom de la mère" le 24 mars 2026 Invitation à la représentation de la pièce de théâtre à Issy-les-Moulineaux Nous vous invitons à la représentation de la pièce de théâtre Au nom de la mère le 24 mars 2026 à Issy-les-Moulineaux. Depuis...

Retour sur le pèlerinage “Lourdes Cancer Espérance”

Michel Franco fc témoigne de son premier pèlerinage avec “Lourdes Cancer Espérance” à “laisser le sourire de la Charité s’emparer de nous”.

Défense du pain et du vin par Benoît Sibille

Pour Benoît Sibille “Le pain et le vin ont perdu le goût de ce pain pétri de nos vies humaines pour devenir une marchandise comme une autre”.

Aucune nuit ne sera noire par Fatou Diome

Dans ce récit initiatique de Fatou diome, un vieux loup de mer va préparer son mousse à se lancer sur l’océan de sociétés méconnues.

Pour une justice aux mille visages par Youssef Badr

Pour une justice aux mille visages par Youssef Badr « Lycéen, je ne m'imagine pas magistrat ni même juriste, raconte Youssef Badr. Je trouve très vite dans le droit une manière d’apporter des solutions à des situations concrètes de la vie quotidienne, à un système...

Le fou de Dieu au bout du monde par Javier Cercas

Javier Cercas accompagne le pape François en Mongolie où la société est tiraillée entre modernisme et traditions millénaires, vie moderne et pauvreté

Nos cœurs invincibles par Tala Albanna et Michelle Amzalak

Depuis un an et demi, Tala Albanna et Michelle Amzalak, étudiantes, s’envoient des lettres dont Dimitri Krier, jeune journaliste au Nouvel Obs, a fait un livre magnifique.

La nuit au cœur par Nathacha Appanah

Nathacha Appanah explore le basculement de la violence conjugale à travers trois récits de femmes victimes de féminicide.

Gaza: la dignité comme résistance

Reem Gonçalves témoigne dans le Bulletin de la Fraternité Anizan de la dignité qu’elle et les siens cherchent à préserver malgré la guerre à Gaza.

Share This