“Vivre ensemble” par Christian Delorme, Philippe Martin
Le parcours du “curé des Minguettes”
« Toutes les rencontres extraordinaires que j’ai faites au cours de ma vie, absolument pas “programmables” dans une existence de simple citoyen et de prêtre catholique provincial, ont constitué des moments forts de mon existence, du Dalaï Lama au pape François, en passant par Simone Veil, des compagnons de Martin Luther King et des petits enfants de Gandhi, ou encore quatre présidents de la République française ! Mais ont été aussi importantes pour moi, plus fondatrices encore, toutes les amitiés que j’ai pu nouer. Finalement, une vie d’homme est composée de toutes les rencontres humaines en profondeur qui peuvent être vécues, là est la vraie richesse. Ce que je suis, je le dois à des centaines voire à des milliers d’autres qui sont ainsi différentes parties de moi [ Christian Delorme ]. Je suis tenté de croire que cette vie qui a été la mienne était mon “destin”, ma “destinée”. Certes j’ai fait des choix, mais l’essentiel m’a été donné, à commencer par l’amour d’une mère qui m’a toujours fait confiance et discrètement soutenu. »
« A vingt ans, je voulais “faire bouger” le monde, sinon le changer ! »
Né en pays lyonnais, terre d’un christianisme engagé et d’une grande richesse intellectuelle, Christian Delorme fut l’homme qu’il fallait au moment où il le fallait. Témoin d’une foi chrétienne tout en mouvement, engagée et profondément heureuse, féconde, exposée et toujours modeste, active et toujours réfléchie, foi catholique et nourrie tranquillement de la variété infinie des opinions. Christian Delorm, prêtre, issu du scoutisme, un parmi les prêtres du Prado, coche à toutes les cases. A mille lieues d’un christianisme nostalgique, peureux, figé, replié dans sa coquille d’escargot.
Une solidarité totale avec des familles et des jeunes confrontés à une insécurité dévastatrice
« A vingt ans, je voulais “faire bouger” le monde, sinon le changer ! » Christian Delorm en avait vingt et un en 1971 lorsqu’il fit un premier « jeûne » de huit jours pour sensibiliser l’opinion publique à la tragédie du peuple Bangladais. Dix ans plus tard, du 2 au 30 avril 1981, avec le pasteur Jean Costil et un homme directement concerné, Hamid Boukrouma, ce sera une grève de la faim pour obtenir la fin des expulsions des jeunes maghrébins nés en France. « Une expérience de ce type ne fut pas un parcours de santé ! Pour moi, il s’agissait d’abord d’une solidarité totale avec des familles et des jeunes confrontés à une insécurité dévastatrice. »
Une carte unique de dix ans, renouvelable automatiquement pour tous les étrangers présents en France
En 1983, du 15 octobre au 3 décembre, cette longue marche est connue faussement comme étant “la marche des beurs” – en fait, c’était une marche colorée pour l’égalité et contre le racisme. Imaginée autour du lit d’hôpital, de Toumi Djaïdja, blessé par un coup de feu tiré par un policier. Commencée à Marseille avec une trentaine de marcheurs, majoritairement musulmans et chrétiens, elle a bénéficié de comités d’accueil enthousiastes et efficaces ; mille cinq cents kilomètres à pied, soixante étapes, cent mille à Paris. « Cette première manifestation antiraciste de l’histoire de France a conduit à l’instauration d’une carte unique de dix ans, renouvelable automatiquement pour tous les étrangers présents en France. Un acquis qui a changé la vie de millions d’immigrés. »
Christian Delorme raconte comment et par qui s’est installé l’islam dans la région lyonnaise
Avec Philippe Martin, Christian Delorme évoque ses longs bouts de chemin avec des juifs, des musulmans, des bouddhistes et des hindouistes. Lorsque Christian Delorme raconte comment et par qui s’est installé l’islam dans la région lyonnaise, ce sont des noms par dizaines qu’il cite, c’est dire la connaissance qu’il a de cette population. Il en est de même pour les autres croyants, les tenants des “autres fois” comme il dit.
Tout cela est-il trop beau ? La lecture de ce livre dit le contraire. Il apporte de l’oxygène, une double ration d’oxygène, au monde et aux croyants ; à nous, les humains.
Gérard Marle fc
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