Simone Weil, la vérité pour vocation

9 Oct 2023 | Livre coup de cœur | 0 commentaires

Auteur de l'article : Gérard Marle fc
Crédit photos : Editions L'Escargot

Simone Weil, la vérité pour vocation

De ses plus jeunes années jusqu’à sa mort précoce, Simone Weil (1909-1943) n’aura eu de cesse d’étonner, d’impressionner, parfois d’agacer. Avec des dizaines d’années d’avance sur son époque, elle dénonce le totalitarisme soviétique, la dictature de la bureaucratie, l’impossible rêve de la technique et l’incohérence d’un développement illimité dans un monde aux ressources limitées. Une telle clairvoyance ne souffre pas comparaison.

Son souci des pauvres relève quasiment de l’obsession

Simone Weil ne variera jamais : c’est le sort des plus démunis qui l’intéresse au premier chef. En pratique, son souci des pauvres relève quasiment de l’obsession. Enfant, elle réserve chocolat, sucre et argent de poche à un soldat dans les tranchées. Professeure, elle distribue son traitement à qui veut : caisses de chômage, presse syndicale, pauvres en tout genre. Elle distribue des livres à qui veut. Plus tard, ce sont ses tickets de rationnement qu’elle partage avec les réfugiés des camps voisins. Son existence entière, tout son temps, sont mobilisés. Au Puy-en-Velay Puy-en-Velay où elle est nommée en 1931, elle prend fait et cause pour les chômeurs, porte leurs revendications, s’affiche avec eux au bistrot et dans les manifestations. Quelques années après, elle décide d’entrer à l’usine pour sentir dans son cœur et dans sa chair l’oppression vécue par les travailleurs ; de ces neuf mois de travail à la chaîne, entrecoupés de périodes de chômage et d’arrêts pour maladie, elle ressort brisée, l’âme en morceaux. En 1936, la voici en Espagne pour combattre dans le camp républicain. Enfin, à l’aube de sa mort, c’est au sein de la Résistance qu’on la retrouve, d’abord dans les réseaux marseillais où elle distribue les Cahiers du Témoignage Chrétien, puis à Londres, dans les bureaux de la France libre où elle ne trouvera jamais sa place.

Simone Weil se rapproche du Christianisme

Pour elle, la pensée doit être libérée de toute emprise, seul est libre l’homme capable de penser par lui-même, d’exercer toute son attention, c’est à-dire de laisser son esprit disponible pour recevoir la vérité, qu’il ait ou non fait de longues études. Une exception, les conditions de travail peuvent être abrutissantes et tuer toute attention, toute pensée, comme elle l’a elle-même éprouvé. Simone Weil s’est longtemps décrite comme une
juive agnostique. Ce n’est qu’après son séjour à l’usine qu’elle se rapproche du christianisme, à la suite de plusieurs expériences mystiques. Après sa première rencontre avec le Christ, au Portugal, en 1935, en écoutant les chants des femmes de pêcheurs en procession, « chants d’une tristesse infinie », elle écrit : « Là j’ai eu soudain la certitude que le christianisme est par excellence la religion des esclaves, que des esclaves ne peuvent pas ne pas y adhérer, et moi parmi les autres. » Puis ce fut Assise, puis l’abbaye de Solesmes.
Elle ne se convertira pas au catholicisme, elle se refuse à tout dogme ; en revanche elle s’est convertie à l’amour du Christ, c’est-à-dire à la figure d’un Dieu fait homme, faible, dont la vie entre pauvreté et charité se termine tragiquement sur la croix. Là Dieu apprend à l’homme que la véritable force n’est pas celle des tyrans.

Le combat s’en s’enfermer dans l’idéologie

J’ai aimé ce livre plus que d’autres sur cette femme qui a pris part à beaucoup de combats sans s’enfermer dans l’idéologie.
Jacques Julliard, historien et éditorialiste, décédé le 8 septembre 2023 à l’âge de 90 ans, fut ébloui : « En un siècle où la masse des clercs firent assaut de lâcheté devant diverses formes de totalitarismes, Weil fut avec Camus l’une des rares à ne pas trahir et à mériter le beau nom d’intellectuelle. »
Quant à moi, il m’est difficile d’oublier l’Évangile de Jean, qui s’adresse à tous : « Si vous demeurez dans ma parole, vous êtes vraiment mes disciples, alors vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres. »

Gérard Marle fc

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