Le fou de Dieu au bout du monde par Javier Cercas
Javier Cercas invité à accompagner le pape François en Mongolie
Tout commence par le coup de fil à un écrivain Espagnol Javier Cercas qui s’affirme haut et fort athée et anticlérical. L’interlocuteur, à savoir le directeur de la maison d’édition du Saint-Siège, lui propose d’accompagner le pape François lors de son premier voyage en Mongolie, justement parce « qu’il n’était pas des leurs ». Il pourra parler avec qui il veut et demander ce qu’il veut, à charge pour lui d’offrir aux lecteurs de ce qui sera son livre, un regard extérieur, différent de celui des journalistes spécialisés.
Ecrire avec un regard extérieur
Javier Cercas nous emmène à la rencontre de personnes très diverses : cardinaux, religieux, religieuses, journalistes et autres responsables des bureaux du Vatican. Mais avant le départ, il s’est donné un objectif : rapporter directement à sa mère âgée et veuve la réponse du pape à cette question : « Croyez-vous à la résurrection de la chair et à la vie éternelle ? »
En effet, depuis la mort de son père, sa mère, fervente chrétienne, lui répète que bientôt elle le retrouvera et que ce sera pour eux un bonheur sans fin ; mais qu’en dit-il, le pape ? Il posera cette question à tous ses interlocuteurs dans l’attente d’apporter à sa mère la réponse du pape lui-même. En effet, Javier Cercas définit cette foi comme un « super-pouvoir » mais qui, à son avis, ne semble pas prendre beaucoup de place dans le discours et la pratique des catholiques. Pourquoi, demande-t-il, alors que dans le domaine social et politique l’Église romaine est bavarde à l’infini, émergent si peu ses paroles de foi dans les médias ?
Tiraillés entre modernisme et traditions millénaires
Arrivé en Mongolie, Javier Cercas est ébloui par les jeunes missionnaires présents ; ils viennent de divers continents et ils ne sont qu’une trace chrétienne infime dans un immense pays de steppes, gelé jusqu’à moins quarante degrés l’hiver et approchant les plus quarante l’été ! Elle n’est pas si simple la confrontation avec les bouddhistes très majoritaires. Ces gens, sortis tout juste du communisme athée, ont une culture propre qui refait surface. La société est tiraillée entre modernisme et traditions millénaires, vie moderne d’un côté et grande pauvreté de l’autre.
“Nous aidons les gens parce qu’ils sont enfants de Dieu”
Aucun prosélytisme n’étant autorisé, que signifie être missionnaire ? Une religieuse se risque : « Parfois, ils demandent : ‘Qui es-tu ? Pourquoi es-tu venue ici ? Pourquoi nous aides-tu ? Alors oui, on leur dit la vérité, nous ne faisons rien de mal. Nous n’aidons pas les gens pour qu’ils deviennent chrétiens, nous les aidons parce qu’ils sont enfants de Dieu. Bien entendu, nos églises ne ferment pas leurs portes et quiconque souhaite venir librement sera accueilli les bras ouverts. Si l’on souhaite nous rejoindre, très bien ; sinon, c’est très bien aussi. » Le pape est venu pour les rencontrer et les encourager même s’ils ne sont que quelques milliers ; il voit là une façon de faire Église.
« L’Église grandit non par prosélytisme mais par attraction. »
Cette approche fait écho à ce que nous vivons comme Fils de la Charité, missionnaires au ‘travail’ ou en ces banlieues, en ces ‘périphéries’ perçues comme des continents lointains par l’Église. Pas de prosélytisme mais une présence fidèle, un engagement sans faille pour promouvoir fraternité et justice. Mettre l’amour gratuit en premier lieu. « L’Église grandit non par prosélytisme mais par attraction. »
J’ai trouvé passionnant de découvrir, derrière les étiquettes ou les structures, des hommes bien vivants, naturels, sans « langue de buis », réactifs, lucides, et un pape François avec son histoire et les blessures qui lui sont propres. Dommage qu’il soit mort car j’aurais aimé dire : « Vivement le prochain voyage ! ».
Quelle a été la réponse du pape pour la mère de Javier Cercas ? Lisez jusqu’au bout.
Eric Récopé fc

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